Avoir une bonne mémoire en 2025
- Rosa

- il y a 12 minutes
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“J’ai la mémoire courte”, c’est une phrase que j’ai prise l’habitude de dire ces dernières années afin de justifier le fait de ne pas me souvenir de quelque chose. En effet, depuis 5 ans, ma mémoire flanche, me fait défaut, me trahit et les manquements me mettent mal à l’aise. D’ailleurs, je ne sais pas vous, mais beaucoup de choses ont changé pour moi depuis le confinement, je réalise ce « avant et après » assez souvent, comme par exemple de plus porter de pantalons moulants et de ne plus supporter les bruits de la ville. Et donc la faillibilité de ma mémoire en fait partie.
Je tente de trouver des explications …Pourquoi ?
Première raison, la plus évidente et facile, c’est de chercher du côté de la biologie. J’ai 45 ans (46 dans 2 semaines) : forcément, les fonctions de mon cerveau de femme perimenopausée ne sont plus les mêmes et ça ne va pas aller en s’arrangeant. En effet, la perte de mémoire et le manque de concentration sont deux des symptômes courants de la ménopause et de surcroit, ces troubles cognitifs constituent souvent une source de stress et d’anxiété pour les femmes qui en souffrent.
Ensuite, en tant que féministe, bien sûr, j’ai cherché du côté de la charge mentale. J’ai ouvert une librairie, ce qui représente non seulement la gestion d’une entreprise mais aussi la responsabilité de 3 personnes avec qui je travaille. Tout ça avec beaucoup de stress, fatigue, taches diverses, les nouvelles compétences, énormément d’interactions, le contexte mondial et national et la précarité du métier de libraire. Faut-il préciser que j’ai aussi une vie perso de mère de deux ados, un compagnon, des amiX, etc., etc.? Comme la plupart d’entre nous, j’ai une vie remplie comme jamais et “ralentir” est devenu mon projet pour les années à venir (poke Lauren Bastide)
Bref, il y a de quoi exploser le cerveau et donc le rendre moins fonctionnel !
D’ailleurs, je me suis mise à créer des listes de tout depuis, alors qu’avant tout était dans ma tête et c’était suffisant — je ne pense pas avoir souvent manqué à mes obligations. Aujourd’hui, après avoir épuisé la méthode (inefficace) des to-do listes, je teste une nouvelle méthode de time-blocking , pour rien oublier et pour améliorer mon organisation et ma productivité (j’écris le mot productivité avec un certain dégoût vis-à-vis de ça).
Et puis, j’ai lu le livre de Karine Sahler « Faire de la place » et j’ai trouvé l’explication ultime à ma soi-disant perte de mémoire !

Dans son brillant essai, l’autrice dit que “à l’image de nos placards débordants, nos journées de déroulent dans un tumulte infernal…”. La charge mentale, les notifications, les infos à ingurgiter, les réseaux sociaux, les sollicitations permanentes, la prolification des contenus culturels à lire/écouter/voir. Cette frénésie de notre quotidien crée un encombrement mental de notre esprit.
“La sensation d’encombrement mental, cette impression de ne plus savoir où donner de la tête, d’étouffer, de crouler, est presque devenue notre norme d’existence…… Dans ce monde capitaliste, la course est devenue notre état d’être par défaut"
Voilà, je vous laisse méditer sur cette dernière phrase qui m’a retournée le cerveau. J’ai trouvé la raison ultime de ma soi-disant perte de mémoire. Je me suis dit que cette question de mémoire est aussi politique. De nombreuXe penseureuses féministes ont déjà réfléchi, et continuent à le faire, sur cette fameuse politique des affects. La joie, l’empathie, la colère, le repos, nos fantasmes, etc. : tout est politique. La mémoire aussi. Et notre capacité de se souvenir est colonisée, usée, ébranlée, parasitée par le système capitaliste, productiviste, colonial et écocide dans lequel on vit.
Et quand on sait ce qui nous arrive, on peut commencer à réfléchir à comment y remédier.
Karine Suhler propose plusieurs pistes de réflexion. Se reposer, réinvestir notre vie matérielle, se réapproprier le travail de subsistance qui est relégué aux autres aujourd’hui, porter attention à la qualité de nos gestes. Et cela m’a tellement parlé que j’ai pleuré à la fin.
Je vous invite à lire ce court essai de 150 pages, bien investies, si à la question “Comment ça va?”, vous avez pris l’habitude de répondre “C’est la course”.
Ce livre est devenu ma boussole de vie pour les années à venir. Et ma mémoire le remerciera (et son autrice of course) !
“Faire de la place”, de Karine Sahler, aux éditions Les Renversantes, créé par
Victoire Tuaillonet Karine Lanini, 17€






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